Société

Chasse aux sorcières ou justice équitable ? : Le dossier Matata Ponyo interpelle

Aux dernières nouvelles, le Procureur de la Cour de Cassation aurait finalement demandé la levée des immunités du Sénateur Augustin Matata Ponyo Mapon afin qu’il soit poursuivi pour sa responsabilité (avérée ou supposée ?) dans la faillite qu’a connue le projet Bukanga Lonzo. Quoi de plus normal si le plus recherché dans cette affaire se trouve être l’établissement de la vérité! Mais quand la justice est rendue pour exemple, bien souvent elle est disproportionnée alors que nul n’ignore que l’instruction n’est faite qu’à charge et ou à la décharge de ceux qui sont poursuivis.

Dans le dossier Matata, il ne faut pas s’en cacher, le plus étrange reste son rebondissement permanent, ce, en dépit des efforts des uns et des autres de clarifier les tenants et les aboutissants dudit dossier. D’ailleurs Augustin Matata  lui-même a, il y’a peu, tenu une conférence de Presse à ce sujet à Kinshasa devant un parterre des journalistes pour fustiger ce qu’il a qualifié d’acharnement sur sa personne. Au cours de cet échange avec la presse, l’ancien Premier Ministre a eu à répondre à plusieurs questions parmi lesquelles ses relations avec l’inspection Générale des Finances dont l’audit a été réalisé sur sa propre demande et sans qu’aucune preuve de sa culpabilité ne soit établie à propos de ce dossier. Il sied de noter que sur la même affaire, une enquête menée par des journalistes dont la probité et la rigueur professionnelle ne sont pas à démontrer. Résultat: l’investigation a abouti aux mêmes conclusions. Comme quoi, l’ancien Premier ministre, n’ayant pas géré le projet au quotidien, celui-ci avait été confié à un manager sud-africain qui avait signé avec le Ministre en charge du dossier un contrat de performance.

Pas rationnel donc d’impliquer Augustin Matata dans l’ensemble des actes répréhensibles, avait conclu ce rapport. Comment comprendre dès lors que l’ancien Premier Ministre soit présenté comme auteur intellectuel des éventuels détournements sans qu’aucune preuve ne soit établie jusque-là quant à ce?

C’est là que certains observateurs avertis de la vie politique de la RDC s’inquiètent de ce nouveau principe qui tend à se développer dans la jurisprudence congolaise, principe consistant à ce que, à défaut des preuves matérielles et face à la persistance des soupçons, un accusé soit déclaré coupable en qualité « d’auteur intellectuel ». Une gymnastique juridico métaphysique qui ne favorise pas l’éclosion d’une justice équitable. La faute étant individuelle et la démonstration de la preuve incombe à l’accusateur.

Il est strictement urgent de réhabiliter le droit à la présomption d’innocence. Augustin Matata, ancien premier ministre de la RDC, dont les ambitions pour un destin national sont entendues par plusieurs sans qu’il n’ait encore rien dit, serait t-il devenu du coup un obstacle sur les chemins d’autres ambitions?  Telle est la vraie question sur table. Autre question à se poser, Augustin Matata aurait-il par sa démission au PPRD et au FCC franchi la ligne rouge dont la séquence serait éventuellement l’effet boomerang de son acte de liberté?

De quoi s’interroger sur une justice à la carte, sinon à la tête du client. S’il faut juger de la faillite du projet Bukanga Lonzo, doit-on l’imputer à son concepteur ou à celui qui a cessé de le financer? Voilà qui justifie même le fait que Matata lors de sa conférence de Presse n’a pas hésité à citer nommément ceux qui avaient intérêt à l’arrêt si pas à la mort de ce méga projet.

Quoi de plus normal d’affirmer que si la justice doit être dite, elle devra donc l’être pour tous, le chef du gouvernement de l’époque n’ayant fait qu’exécuter le plan conçu et  validé par le conseil des ministres.

Là où ce cas interpelle les consciences restent dans le fait que ne sont traînés en justice que ceux qui ont osé faire quelque chose pour le peuple. À se demander vraiment si pour garantir son avenir, il ne faut simplement ne rien tenter de faire pour la République tant qu’on est en poste parce que malheur finit par suivre ceux qui pensent apporter un plus. Le cas Matata avec plusieurs réalisations à son actif en dit long.

Une société qui tue ses meilleurs ne peut progresser, a dit un jour un sage!

Le cas Matata ne devrait en aucun cas nous rappeler au souvenir de la célèbre affaire Dreyfus!

Michel Kayak

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