Politique

Éditorial : Les non-dits du discours présidentiel

Ils sont nombreux qui attendaient des décisions de ce discours car il intervenait au lendemain d’une situation inhabituelle pendant laquelle les émotions ont atteint un niveau élevé. Les friands des scandales et des rixes politiques se disaient que le Président allait frapper et d’une certaine manière se venger de ceux que l’on considérait comme les « coupables » à savoir l’Assemblée Nationale et La Primature. Sachant qu’il a le pouvoir de dissoudre et de renvoyer le gouvernement, certains politiques de son camp ayant une influence puissante avaient tenu la main du chef pour qu’il agisse comme Thor avec son marteau. D’autres avaient déjà préparés des armes pour riposter si jamais celui-ci avait osé. Le grand jour arrive, le Président prononce un discours, l’un de plus courts de son mandat sur un ton péremptoire, mais sans décider formellement de ce qu’il mettait sous l’enclume présidentiel. Des commentaires vont dans tous les sens et les extrémistes de deux camps sont déçus et regrettent qu’il n’ait pas fait saigner. Et d’ailleurs, dans son propre camp, on jase en disant qu’il a reculé sur sa marche et qu’il ne doit pas donner l’image d’un chef qui recule et qui agit faiblement. Du coté de ses partenaires, les lignes n’ont pas bougé, ils continuent à ester sur le registre de la violation de la constitution et le prennent à partie contre ce qu’ils estiment être une action en dehors des circuits légaux. Et pourtant, plusieurs choses ont été dites dans ce discours le plus court et les analystes habituels se sont trompés car ils s’attendaient à le juger sur des décisions concrètes et à le voir poser des actes qui changent la configuration de l’espace politique actuel.

Or, il faut aller au fonds des choses, lire entre les lignes et découvrir les codes multiples insérés dans les propos du Président, codes destinés à ceux qui ont le pouvoir d’action dans ce pays et qui sauront eux de quel côté est la route tracée par le Président. Ils ne sont pas nombreux, les initiés de la haute politique, ceux qui ont les clés pour décoder le message du Président. Sans entrer dans le fond de sa pensée exprimée en partie, il y a une grande considération qui aurait échappé à ceux qui disent que le Président n’a rien dit. Pour saisir son message, il faut se situer sur le plan moral, sur le plan des valeurs intrinsèques qui guident une action destinée à conduire la marche des peuples. Le Président a émis un jugement moral sur la qualité de la coalition. Il a donné les conclusions de son observation depuis la mise en place de cette plate-forme de gouvernance et il a dit qu’il y a avait un problème majeur d’efficacité.

Le véhicule qu’il conduisait ne semblait plus correspondre au terrain et semblait se diriger vers une autre direction. Dans cette lecture faite par le Président, il ne s’exclut pas, il se met dans le bain et il accepte les conclusions logiques découlant des prémisses observées. Le Président met en cause la capacité de l’accord à correspondre à l’ampleur des défis. Se plaçant pour la Première fois et ce de manière claire comme le leader de la coalition, il prend le courage d’assumer les pannes de la Gouvernance. Cette attitude morale est une grande avancée dans la pratique politique. Pour saisir cette posture, il faut trouver une autre situation similaire avec son prédécesseur Joseph Kabila qui avait dans la même attitude épistémologique, déclaré qu’il regrettait de n’avoir pu transformer le congolais. Au journal The Time, il dira qu’il cherchait encore et s’il avait quinze personnes, il changerait la nation congolaise. Ce sont des attitudes qui sont dictées par des éclairs spirituels dans le cœur des leaders et le Président Felix Tshisekedi a montré à ceux qui pouvait le comprendre qu’il était prêt au changement substantiel qu’imposait la situation.

La coalition continuera mais pas dans sa formule actuelle, où les mauvaises habitudes d’user des positions tenues pour avoir accès à des régimes de privilèges. Il consultera et choisira ceux dans les deux camps qui sont prêts à servir le pays avec abnégation et dans le respect des valeurs de dignité et de courage. Il sait que la coalition a montré ses limites du fait des hommes et non de l’accord. Il y a des politiques qui ont continué à se combattre comme adversaires alors qu’ils étaient, le temps d’un match, dans une même équipe. Ces consultations ne vont épargner personne, elles sont décidées et honorées par les deux leaders et les autres doivent montrer leur capacité à s’adapter à la nouvelle donne.

Adam Mwena Meji

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