Culture

INTERVIEW EXCLUSIVE : Ados Ndombasi : « Le théâtre Congolais est en train de succomber »

De Norbert Mikanza ou Mutombo Buitshi, le théâtre Congolais a perdu une grande partie de ceux qui lui ont donné ses lettres de noblesses. L’art du spectacle qui n’attire plus du monde, est devenu le parent pauvre du secteur culturel, lui-même en perte de vitesse. Pour la journée mondiale du théâtre, le 27 mars, Géopolis hebdo a interrogé un homme de culture, devenu député national. Dans son jugement, Ados Ndombasi concède aussi ce constat : « le théâtre Congolais est sous oxygène ».

De votre point de vue de spécialiste et homme de culture, peut-on dire que le théâtre Congolais, le théâtre classique est mort ?

Le théâtre n’est pas mort, mais il est en train de succomber. Il est sous oxygène. Là, c’est le théâtre. Mais parlons de la culture en général. Nous constatons malheureusement que la RDC n’a pas de politique culturelle, et ce manque, impacte négativement sur toutes les disciplines que ça soit le cinéma, le théâtre ou la musique. On sent que rien n’est structuré malheureusement. Le manque de politique fait que nous n’ayons pas d’infrastructures culturelles en RDC. Quand on parle de théâtre, il faut déjà avoir des salles de spectacles. Lorsque vous avez un pays comme la France qui investit chaque année 10 milliards d’Euros dans le secteur culturel, ce pays a plus de 10 000 salles de spectacles. Combien de salles de spectacles avons-nous ? C’est un peu triste ! Le malheur de la RDC est qu’à la tête du ministère de la culture, on met des « ministres stagiaires » qui n’ont pas de vision et qui sont incapables de réhabiliter les infrastructures qui existaient avant et qui sont devenues des salles mortuaires.

Mais comment expliquer qu’à l’ère de l’explosion des médias, le théâtre intéresse si peu. Comment expliquer que la musique prospère relativement et pas le théâtre. Le problème ne serait-il pas à voir du côté de la formation et du suivi de la jeunesse ?

D’abord, il faut dire qu’il y a une grosse confusion : il y a une différence entre le théâtre, le cinéma et la musique. Le théâtre se déroule soit dans une salle de spectacle devant un public, même si aujourd’hui le théâtre a plusieurs formes. Il peut se faire dans la rue ou dans un marché. Dans tous les cas, le public est toujours là. Pour le cinéma, il y a un élément qui s’ajoute et qui nous sépare du public: la caméra. Donc vous comprenez qu’il est plus facile de faire le cinéma que le théâtre. Pour faire le théâtre, il faut les infrastructures. Les quelques salles qu’il y a aujourd’hui, c’est le centre Wallonie-Bruxelles, c’est l’institut Français, là au moins on a la lumière. Le gouvernement doit comprendre que le théâtre est éducatif.
Hier vous étiez seulement opérateur culturel. Aujourd’hui en tant que député, vous êtes au cœur du pouvoir législatif.

Que comptez-vous faire en termes de lois pour aider à relancer le théâtre ?

Il faut d’abord impérativement que la RDC se dote d’une politique culturelle. C’est comme le code minier. Dans le secteur des mines, il y a cette loi qui règlemente tout. Mais le secteur culturel n’a pas une telle loi. Le secteur culturel peut rapporter des millions d’emplois à la RDC mais si seulement nous sommes organisés. Il faut un statut pour les hommes de théâtre et tous les artistes. Nous allons aussi demandé la restitution du palais du peuple aux artistes. Nous avons des gros combats : Il faut investir dans l’homme par l’éducation et la culture. L’homme est un projet culturel. Vous pouvez avoir les meilleures routes mais si vous avez un Congolais pourri, tout sera détruit. Nous n’avons qu’à nous demander quel divertissement nos jeunes ont ?

Propos recueillis par Patrick Ilunga

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