Politique

Reformes électorales et décentralisation : Les inquiétudes de l’alliance nationale des autorités traditionnelles du Congo (ANATC)

Les autorités traditionnelles, rois et princes des royaumes précoloniaux, gardiens des traditions et de la culture réunis au sein de l’ANATC ont manifesté des fortes inquiétudes au sujet de la proposition de loi introduite à l’assemblée nationale par la dynamique du groupe des 13 appelés le G13. Ce groupe des députés et des personnalités qui a accompli une forte croisade pour obtenir des reformes devant garantir la tenue des élections en 2023, élections voulues pacifiques, a dans un aspect de ses propositions fait allusion à une rationalisation de la décentralisation. Cette proposition voudrait que l’on supprime la forme actuelle de la décentralisation en effectuant un rétropédalage et situer celle-ci au niveau du territoire, en escamotant les entités territoriales décentralisées comme cela se fait actuellement. C’est revenir au système ancien qui a duré plus de trente-deux années et dont les effets néfastes sont évidents à savoir une forte paupérisation des populations de l’arrière-pays et un taux élevé de l’exode rural. En lisant le document déposé au parlement le G13 argue le fait du coût exorbitant presque hors de portée de la République s’agissant d’organiser les élections jusqu’ au niveau de ces entités. Voilà la raison évoquée par les politiques. Mais ce point de vue n’est pas partagé par les autorités traditionnelles qui sont au niveau des chefferies et qui sont les principaux animateurs de cette décentralisation.

Réunis récemment à Kinshasa, elles ont confirmé que cette proposition allait constituer un frein au développement des provinces au nouveau de la base. En effet depuis la réforme constitutionnelle et la promulgation du code minier révisé, les ETD sont au cœur des activités de grande transformation de l’arrière-pays, car elles reçoivent pour celles qui abritent des activités extractives une partie de la redevance minière qui est immédiatement destinée aux projets de développement. Ce système qui est le fruit d’un grand consensus national avait pour finalité de construire des ponts de développement entre les milieux ruraux et les milieux urbains. Contrairement à la centralisation dans le parti Etat au niveau des territoires les choses ont bougé. Pour se faire une idée du combat des autorités traditionnelles, il faut se rappeler que les administrateurs du territoire étaient nommés par les partis politiques dont les postes avaient fait l’objet d’un partage équilibré entre les familles politiques. Ces hommes nommés étaient redevables à leurs partis et à leurs parrains qui eux vivaient dans la capitale.

C’est ainsi que les moyens disponibles étaient par un système de retro-commission renvoyés auprès des sponsors au motif de garder des postes. Pendant des décennies aucun pont, aucune route, aucune école ne pouvait se faire à l’initiative d’un administrateur de territoire. Les moyens produits en province ou envoyés en province faisant l’objet d’un pompage industriel de la part du système politique. Dieu merci le changement est intervenu grâce au patriotisme des certaines autorités qui ont décidé de produire des forts impulsions à la base. Organisées dans une alliance nationale, les autorités traditionnelles, ancrages de nos coutumes et animateurs de la force de travail à la base se sont donnés le mot de travailler pour la Nation dans cette nouvelle configuration. Ce système qui dure depuis deux ans seulement a produit des effets spectaculaires dans certaines contrées ou il est en application.

Au bout d’un temps record, des hôpitaux sont construits, des routes tracées comme chez Kamponda, des écoles voire des universités sont construites comme à Djugu et à Bunkeya, des puits d’eaux, des panneaux de signalisation et d’autres ouvrages sans parler d’un coup de massue lancée à l’agriculture. Ces résultats obtenus sont le fruit d’une décentralisation à la base et les acquis de ce modèle sont palpables en si peu de temps comparés aux trente-deux ans de gabegie et de stagnation. Revenir en arrière au nom d’une certaine économie, c’est tirer à bout portant dans un système novateur dont les effets bénéfiques sur les populations commencent à peine à se faire sentir.

Au cours de leurs échanges, les rois et princes ont condamnés avec la dernière énergie les relents du tribalisme qui se manifestent par ci par là à cause de l’intolérance politique et qui remettent en cause l’unité et la concorde nationales. Mais ils ont aussi fustigé le fait que certains proposent qu’ils ne soient plus fait mention de nos origines sur les cartes d’identité pour éviter cette stigmatisation de nos appartenances tribales. Ils disent que c’est une chose que de combattre le tribalisme, mais il serait suicidaire pour un peuple de se priver de son identité au motif du mauvais usage de celle-ci par certains de ses membres. L’identité culturelle est la nourriture de l’âme collectivité et le ciment de la fierté des communautés. S’attaquer à celle-ci c’est briser les racines de la différence qui font la fierté des peuples et qui donnent à la civilisation ses lettres de noblesse ont déclaré les différents chefs.

Par ailleurs il convient de signaler les membres de l ANATC qui se sont réunis en février dernier dans une assemblée élective ont reconduit dans ses fonctions le Mwami Mwenda Bantu Munongo M siri qui est secondé par 26 vice-présidents représentants les 26 provinces. L’ANTC a aussi élu un secrétaire général en la personne du prince Betanga Bokuta Botshitshi en remplacement de Mfumu Bifima Bolls. Quelques changements ont été apportés au fonctionnement par des amendements comme l’obligation des membres de cotiser, par le fait que la qualité des membres s’obtient par adhésion et que le Président de la République en fonction est d’office Président d’honneur de l’Alliance et son prédécesseur demeure membre d’honneur.

Robert Tanzey

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